Monday, October 22, 2018
trajet du soir
Je suis (du verbe suivre) la lune. Une lune si grosse et ronde qu'on la dirait carrée. J'ai failli rire en la voyant. Elle pend au dessus du pont bleu, assez basse, disparaît derrière les immeubles pendant la traversée. Le ciel est bleu nuit, vaste et sombre et ne devrait pas avoir besoin d'autant d'adjectifs pour lui rendre justice. Le ciel est et je pédale 17ème, 18ème, 19ème. Ecluse à nouveau en train de laisser passer des bateaux, donc barrières baissées, je me faufile pour rejoindre le groupement de cyclistes et de scooters accumulés en tête de file, prêts à bondir dès l'ouverture. Etrange sensation de communauté, on est là, tout serrés, à attendre. On regarde les chaussettes de l'un, le sac à dos de l'autre, le vélo, les casques. Rare de voir d'aussi près les cyclistes que l'on ne fait que croiser à la volée. On en profite. Une fille métisse a dans son sac à dos une enceinte. Pas très forte musique africaine, rythme envoutant, je tapote sur mon guidon. Je vois sa cheville qui oscille. L'homme à côté bouge sa tête comme en transe, il ne doit pas savoir que son cerveau s'est branché sur la fréquence d'à côté. Pulsations, connectés on attend. Et la tension se défait aux premiers coups de pédales, aux premiers rugissements de moteurs. Comme chorégraphié.
trajet du matin
Brume, petite quinzaine de degrés, certaines sortes de cyclistes sortent les gants sur le guidon. Élégante grisaille d'automne, on était si habitué au ciel bleu que le gris en devient distingué. Passage de l'écluse par les marches, le pont est levé, les panneaux lumineux rouge interdisent la circulation, et de toute façon les barrières sont baissées. Descente du vélo en mouvement, hop sur l'épaule, à gauche la rotonde, Stalingrad, à droite les moulins de Pantin, la Villette, c'est reparti, en selle. Passés les immeubles à la gratte-ciel, je roule vers rue Riquet, vers lui, vers le pont bleu. Le Pont Bleu. Le lever du soleil toujours dans le dos, je me dégage de l'écharpe en veillant à ne pas perdre mes boucles d'oreille pour tourner la tête à 180° et apercevoir les lueurs du jour. Espace, passerelle, route, chemins de fer, la vie cinématographique, on est obligé sur ce pont de la ressentir comme une possibilité parmi d'autres, mais une possibilité tout à fait présente et même présentable. (Je triche, je n'écris pas, ce sont le mots qui écrivent et qui s'attachent les uns aux autres comme des chariots aimantés.) Le café en bas du pont, avec une terrasse en pleine lumière. Il faudra m'y arrêter un matin. Avant de me faire avaler par le 18ème.
Sunday, October 21, 2018
fantômette
Ifemelu tient un blog. Ifemelu, c'est le personnage principal du roman Americanah que tous mes abonnés Instagram ont l'air d'avoir déjà lu. Etrange sensation, mais heureusement un livre se délivre de la même façon à chacun, c'est à dire individuellement et uniquement. Donc malgré l'impression de lire une autoroute déjà appréciée par tant d'autres, j'ai la satisfaction d'y avancer comme sur ma propre petite route de campagne. Trop de métaphores ? *hochement d'épaules*
Il est bien ce livre, un peu long par moment, mais il détient cette capacité à vous faire oublier votre vie et à vous projeter totalement dans le présent du récit, à Lagos, à Philadelphia ou Baltimore. Ceci n'est pas une critique, ni un résumé, juste une sorte de commentaire-frôlement né de l'envie de partager ce qui ronronne dans ma tête ces dernières soirées. Ifemelu et Obinze.
Le blog dans le livre est d'utilité sociale, il pose un regard sur la société, la décortique, donne naissance à des débats in the comment section.
Ce blog dans la vraie vie est d'utilité personnelle, avouons-le, il pose un regard sur euh il n'en pose pas, il traduit un regard en mots, le décortique, donne naissance à encore plus de mots.
Cette foutue duplicité. L'impression d'avoir été mal copiée-collée. Une partie de moi est floue, sans prise sur la réalité, aussi présente que peut l'être une lumière ou une odeur : pas assez pour empoigner les portes et les corps.
Bouh. Je est un fantôme par moment.
Il est bien ce livre, un peu long par moment, mais il détient cette capacité à vous faire oublier votre vie et à vous projeter totalement dans le présent du récit, à Lagos, à Philadelphia ou Baltimore. Ceci n'est pas une critique, ni un résumé, juste une sorte de commentaire-frôlement né de l'envie de partager ce qui ronronne dans ma tête ces dernières soirées. Ifemelu et Obinze.
Le blog dans le livre est d'utilité sociale, il pose un regard sur la société, la décortique, donne naissance à des débats in the comment section.
Ce blog dans la vraie vie est d'utilité personnelle, avouons-le, il pose un regard sur euh il n'en pose pas, il traduit un regard en mots, le décortique, donne naissance à encore plus de mots.
Cette foutue duplicité. L'impression d'avoir été mal copiée-collée. Une partie de moi est floue, sans prise sur la réalité, aussi présente que peut l'être une lumière ou une odeur : pas assez pour empoigner les portes et les corps.
Bouh. Je est un fantôme par moment.
Saturday, September 15, 2018
fièvre
Ris pas, Paris. C'est pas drôle de m'accueillir comme ça. Ton câlin contagieux et tes particules fines m'ont offert la 3ème rhinopharyngite de l'année, la première de la rentrée, avant même d'avoir repris le travail. Je vais débarquer bronzée mais avec une voix de dinosaure et mes sachets de tisane au thym. Je ne sais vraiment pas comment je dois le prendre. Entre 'prendre' et 'laisser', si je ne préfère pas 'laisser'. Ne rien entreprendre. Lasse d'essayer. Partir pour le meilleur. C'est toujours mieux ailleurs. Ici c'est Paris. Entre nous, it's complicated.
Monday, September 10, 2018
lnd
Est-ce que l'Eurostar va devoir changer de nom quand le Royaume Uni ne sera plus dans l'Union européenne ? Sera-t-il la dernière étoile filante d'un ciel en syncope ? Sursaut journalier reliant villes-soeurs aux parents tristement divorcés ?
Questions qui me traversent la tête à mon retour de Londres. Londres toujours aussi décomplexé, divers et dingue. Les villes ont des personnalités, les espaces sont comme des traits de caractère, et Londres me semble si large, cent fois moins étroit que Paris. Oui, Paris me semble bien petit ce soir, j'ai l'impression de rentrer à mon clapier, avec le périph' qui me démange comme une ceinture trop serrée.
Questions qui me traversent la tête à mon retour de Londres. Londres toujours aussi décomplexé, divers et dingue. Les villes ont des personnalités, les espaces sont comme des traits de caractère, et Londres me semble si large, cent fois moins étroit que Paris. Oui, Paris me semble bien petit ce soir, j'ai l'impression de rentrer à mon clapier, avec le périph' qui me démange comme une ceinture trop serrée.
Wednesday, August 29, 2018
rdv
C'était l'été. L'été a été, puis l'été était à nouveau, puis plus, s'est tu, et l'automne était là.
À la plage, depuis une semaine, on bascule chaque jour d'une saison à l'autre, deux pas en avant, un pas en arrière, comme si la marée crochetait le temps. On guette le fond de l'air, la couleur de la mer, la température des galets. Mais il n'y a pas à se méprendre, l'automne est l'homme de la situation. Ponctuel, élégant dandy au foulard en soie. Un peu vieux jeu, vieille école, d'avant le réchauffement climatique. Beau comme toujours.
Monday, August 20, 2018
baloji
On va trop rarement jusqu'au bout des mots. Ils circulent en orbite autour d'une planète-nombril. Mais heureusement pour le monde, d'autres font le boulot. Je viens de découvrir Baloji, poète congolais et belge, congaulois comme il dit. Comme ça fait du bien d'entendre des mots augmentés, joueurs, précis, surprenants ! L'appauvrissement de la langue française dans le rap, dans la chanson, un vrai sujet. Eh bien là, ce sont des poèmes. Poèmes qui balancent avec grâce et rythme et tout ce qu'il faut de puissance leur cargaison de sens. Ils se posent là, sur les lèvres, dans les jambes qui se mettent à danser, ils sont importants. Il faut bien deux continents pour être à la hauteur. J'ai pris mes places pour son concert au Café de la Danse en novembre. A bon entendeur.
Bleu de nuit
"Cette traversée du désir t'épuise le bassin" <3
Bleu de nuit
"Cette traversée du désir t'épuise le bassin" <3
Thursday, August 16, 2018
cup
The Daily Feast calls for a Go-to Verbal Tea:
Fresh words from your weird garden, boiled to a literary liquid like no other.
A blessed cup of words making sure reality gets to you smoothly.
Enjoy.
Fresh words from your weird garden, boiled to a literary liquid like no other.
A blessed cup of words making sure reality gets to you smoothly.
Enjoy.
creux de la vague
Je m'ennuie. J'ai encore acheté des livres que je vais devoir rapatrier à Paris. Il va me falloir une malle. Plus il y a de nuages, plus je récidive. Acheter un livre, c'est comme acheter du temps : je m'engage à le lire, à lui réserver une plage. Ça rend l'avenir plus radieux. C'est déjà ça de gagné sur les écrans. I am a secret dinosaure.
Donc je suis allée à La Galerne (incontournable librairie havraise), ensuite j'ai essayé d'aller m'installer à la bibliothèque Oscar Niemeyer niché sous le Volcan mais elle était fermée. Déroute du seize août. Je suis revenue sur mes pas pour jeter un oeil à un espace de coworking qui vient d'ouvrir. Volumes impressionnants, odeur de voiture neuve, et une sur-motivation palpable. Ils ont voulu trop bien faire et résultat c'est moche. Je suis vache. C'est moche par touche. C'est joli par endroit. Le tout est assez patchwork et l'identité graphique est d'une indécision qui fait mal au coeur. Du tropical, du manuscrit, de l'empattement, du rouge, du turquoise, du noir et blanc, brrrr.
La poule retourne à ses petits bouquins.
Donc je suis allée à La Galerne (incontournable librairie havraise), ensuite j'ai essayé d'aller m'installer à la bibliothèque Oscar Niemeyer niché sous le Volcan mais elle était fermée. Déroute du seize août. Je suis revenue sur mes pas pour jeter un oeil à un espace de coworking qui vient d'ouvrir. Volumes impressionnants, odeur de voiture neuve, et une sur-motivation palpable. Ils ont voulu trop bien faire et résultat c'est moche. Je suis vache. C'est moche par touche. C'est joli par endroit. Le tout est assez patchwork et l'identité graphique est d'une indécision qui fait mal au coeur. Du tropical, du manuscrit, de l'empattement, du rouge, du turquoise, du noir et blanc, brrrr.
La poule retourne à ses petits bouquins.
Friday, August 3, 2018
°
Il fait chaud ce matin, aucune fraîcheur à attendre de la mer. Marée basse, étale voire étalée, elle a déjà l'air fatiguée à l'idée de remonter. Journée de canicule. La France grille, Le Havre un peu moins. L'eau est à 20°C, l'air à 30°C.
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