Je sais que je vais quitter Paris dans pas longtemps. Alors je suis piétonne autant que je peux. Après avoir tant été cycliste ! L'un n'empêche pas l'autre - enfin, depuis la fin du confinement, il y a débat... Cette ville ne se dévoile vraiment qu'à celui qui l'arpente.
J'y plonge et je suis surprise à quel point elle m'est devenue familière. Prenons le boulevard Magenta, il est devenu un maître étalon, en y passant je mesure les écarts, les avancées de ma propre vie. Toutes les petites rues perpendiculaires, où des enfants jouent en terrain complètement inapproprié en criant des phrases d'adultes, où l'on risque de se prendre la pluie d'un géranium et le trottoir en prime parce que justement la bande de ciel accessible était mouchetée...
C'est un labyrinthe dont le plan s'est imprimé en moi, j'y marche au radar, de préférence les mains dans les poches, en tout cas sans sac, pitié, pas de sac. Légère et sportive si en basket, légère et fière si en talons. Quelle ville de pourris gâtés. Où l'on se fait livrer des plats pour son chat, où arrivent des huitres de Cancale et où les vins naturels coulent en terrasse. Quelle ville pour encaisser autant de destins, ouvrant, fermant, ouvrant des portes parallèles partout. Tout est si compact, le soir la poudre de Paris teinte grisâtre ne s'enlève qu'après trois cotons imbibés.
Paris à grands pas, qui sait tant de choses sur moi que j'en frémis. Combien de mois nous reste-il ?